Tout le monde s’accorde à dire aujourd’hui que les salariés veulent du sens dans leur job. Jusque dans les années 80, travailler était avant tout un moyen de ramener de l’argent dans le foyer. Mais depuis une dizaine d’années, le travail fait partie intégrante de sa vie, de son épanouissement personnel et de son bien-être. Plus question d’effectuer un bullshit job, sans objectif. Ou d’être un simple maillon de la chaine dans une entreprise de plusieurs milliers de salariés, en attendant ses vacances et la retraite.
La jeune génération est le fer de lance de cette révolution. Et elle n’hésite pas à quitter un job rémunérateur pour un avenir incertain dans un métier manuel, au bas de l’échelle, malgré un bac + 5. Mais avec l’envie de se lever chaque matin pour aller faire son pain, traire ses vaches ou créer un spectacle. La réalisation personnelle occupe une place essentielle dans la vie de la génération Y. Celle-ci souhaite allier travail, indépendance et plaisir, sans sacrifier sa vie privée. Ils ont vu leurs parents se tuer à la tâche toute leur carrière pour se faire licencier sans ménagement à 50 ans. Et ils ne veulent plus donner toute leur vie à une entreprise et un patron, dont ils ne savent rien.
Mais ils ne veulent plus non plus d’une vie « plan plan » où le salaire sert à payer le crédit immobilier, les loisirs et épargner pour plus tard. Victimes des « trente piteuses », mais nés aussi avec le numérique et la mondialisation, ils veulent des expériences, parcourir le monde, découvrir un maximum de choses... Et ne jamais mettre de côté leurs rêves, leurs espoirs, leurs envies, comme l’ont fait leurs parents. Le job n’est plus un moyen d’avoir la vie dont ils rêvent un jour. Mais il partie de leur chemin de vie. Il s’y intègre comme une pièce de puzzle, avec sens.
Le sens au travail c’est une activité avec un but qui correspond à ses valeurs. C'est une activité intéressante, effectuée avec plaisir. Mais c'est aussi se sentir utile aussi bien dans l’entreprise que dans la société. C'est participer à l’élaboration d’un monde nouveau, ou à améliorer la vie des autres. Le tout avec bienveillance et sérénité. Les barrières vie professionnelle/vie privée sont minces. Et la vie en elle -même n’est plus compartimentée. Avoir un maximum de services à disposition « comme à la maison » est de plus en plus fréquemment demandé dans les entreprises : cafétéria, salle de sport, afterwork, service de pressing ou covoiturage… Ces services ne sont plus rares en entreprise aujourd’hui. Et ils font même parti du package lors de l’entretien d’embauche.
Les collègues de travail forment une communauté, comme celle de ses amis ou de sa famille. On pense encore à son job, même à la maison. Non pas par obligation, mais parce qu’on adore ce qu’on fait. L’objectif étant de développer son potentiel, de se surpasser et de devenir meilleur en tout point. La compétition, l’enrichissement ne sont plus un objectif. Le bien-être au travail n’est pas une expression marketing, mais une réalité. Tout manquement peut être vécu comme une trahison et s’orienter vers une rupture : démission, rupture conventionnelle, création de son propre job, année sabbatique, tout est possible pour échapper à un job vide de sens, ou pire un mal-être au travail.
L’entrepreneuriat a fait un bon énorme dans la société ces 10 dernières années. Déjà grâce à la création du statut d’autoentrepreneur qui permet de créer son propre job à moindre risque. Mais aussi avec la prise de conscience des avantages d’être son propre patron : on ne travaille plus à la réalisation du rêve d’un autre - son patron - mais au sien. On est libre, on crée ses propres obligations. On sélectionne ses clients, ses collaborateurs. Et on choisit la direction vers laquelle on veut aller. On donne un sens à chaque tâche qu’on effectue, même si elle peut paraitre ennuyeuse : comptabilité, commercial, négociations avec la banque… Tout devient intéressant, tant que c’est pour soi !
Certes la rémunération est souvent absente de l’équation, au moins les premières années. Mais celles et ceux qui franchissent le cap ont aussi changé de regard sur ce point. Ils ne sont pas rares à s’engager dans une démarche de décroissance. Avec moins de consommation, d’achats, de possession, pour s’orienter vers la réalisation d’expérience, les rencontres... Et pour de plus en plus d’entre eux, l’installation en Province, ou à l’étranger, où le cout de la vie et les tentations sont bien moindres que dans les grandes villes occidentales. Se mettre à leur compte leur ouvre un champ des possibles où le sens est évident, et permet de devenir, et rester soi-même, quoi qu’il arrive dans sa vie ou dans le monde.